L’arthrose est intimement associée au système immunitaire. D’un côté, l’expression du système immunitaire passe par un phénomène inflammatoire chronique de faible intensité, dans toutes arthroses étudiées. De l’autre, la plupart des spécialistes considèrent dorénavant l’arthrose comme une maladie inflammatoire à part entière, avec implication immunitaire.

Différentes observations cliniques mettent en scène de multiples acteurs du système immunitaire. Prostoglandine, mastocytes, macrophages, les lymphocytes T et B ou encore les différents médiateurs inflammatoires, tels que les cytokines, les chémokines et les médiateurs lipidiques hormonaux confèrent à l’immunité un rôle non négligeable dans la genèse arthrosique.
Même dans l’arthrose de type posttraumatique, la vision d’une arthrose liée à une augmentation de contraintes articulaires, comme seul élément responsable du développement arthrosique, est écartée, au profit d’acteurs immunitaires, tels que les macrophages ou les mastocytes.

En cas d’arthrose, les lymphocytes T sont principalement situés au niveau de la membrane synoviale et sont notamment composés Lymphocyte T helper qui augmentent l’infiltration de macrophages au niveau de la membrane synoviale, contribuant ainsi à la production de cytokines pro-inflammatoires.
Les macrophages qui se trouvent dans la poche synoviale, libèrent principalement de l’interleukine 1 et du TNFα, deux cytokines qui déclenchent le processus de l’inflammation. Le TNFα, quant à lui, stimule la mort commandée (apoptose) des chondrocytes, qui ne se renouvellent plus (1à5).

Bien sûr, l’implication du système immunitaire ne peut cependant pas être considérée comme seul élément responsable de la genèse arthrosique. Aucune étude ne lui accorde un rôle indépendant. La contribution immunitaire est à mettre en lien avec d’autres facteurs intervenant dans la genèse arthrosique.

Par exemple dans l’arthrose métabolique, une implication simultanée du système immunitaire et de la surcharge articulaire, agissent tous deux de concert pour induire, à terme, les phénomènes inflammatoires et cataboliques relatifs à l’arthrose(6). 

Lien entre la santé articulaire et microbiote

L’abondance du microbiote et l’arthrose est de plus en plus étudié (7).
Le microbiote intestinal est un ensemble de bactéries, virus, champignons vivant à l’intérieur du tube digestif. Il abrite 500 à 1000 espèces bactériennes, 100 000 milliards de bactéries. Une dysbiose intestinale, une perturbation de cet écosystème induit :

  • Une augmentation des espèces pro-inflammatoires : Lactobacillus spp, Methanobrevibacter spp, Fusobacterium, Faecalibacterium, Stretococcus, Betaproteobacteria …
  • Une diminution des espèces anti-inflammatoires : Bifidobacteria, Ruminococcaceae …
  • Une diminution des acides gras à courte chaîne (AGCC), en lien avec les lésions articulaires, leur progression et la douleur articulaire.

Deux signatures microbiennes de l’arthrose sont mises en lumière.

  • Une « signature intestinale » qui se matérialise par une abondance d’espèces pro-inflammatoires, en lien avec la douleur arthrosique. Une protéine, la phospholipase A2-IIA, naturellement présente dans l’intestin provoque la formation de molécules qui exacerberaient les maladies inflammatoires chroniques. Cette protéine interagit peu avec la membrane des cellules humaines mais avec la membrane des bactéries. Elle se lie à leur membrane et elle la scinde, libérant ainsi de petites molécules telles que des acides gras, pro-inflammatoires qui exacerbent l’inflammation chronique.
  • Une « signature cartilagineuse » qui se traduit par une augmentation des espèces « gram négatif » : Escherichia, Salmonella, Shigella, Klebsiella, Enterobacter, Serratia, Proteus, Morganella et Yersinia.

Les femmes, plus sujette à l’arthrose que les hommes et plus particulièrement après la ménopause manquent d’œstrogène. Ce déficit entraîne une perméabilité de l’intestin.

Que faire ?

La composition du microbiote intestinal peut être modifiée et la dysbiose diminuée.

Les facteurs modulant sa composition sont l’alimentation, le poids et le niveau d’activité physique. L’exercice peut changer la composition du microbiote intestinale (8). Il améliore le ratio des Firmicutes et Bacteroidetes.

Une alimentation riche en fibres, en pro et prébiotiques favorisent la production d’acides gras à chaine courte par l’intestin, qui contribue à diminuer l’inflammation arthrosique(9) et diminuer le risque d’arthrose(10).

Plusieurs études ont montré que l’administration de certaines souches probiotiques, pendant 6 mois de traitement, pouvait stimuler le métabolisme osseux, atténuer la douleur et réduire les réponses inflammatoires de différents troubles musculo-squelettiques liés à l’âge, dont l’arthrose. Les souches les plus efficaces pour traiter l’arthrose seraient :

  • Lactobacillus casei Shirota (LcS), largement étudié pour son action sur la douleur et la raideur arthrosiques, ainsi que sur l’inflammation articulaire.(11)
  • Lactobacillus rhamnosus, également utilisés pour favoriser la perte de poids.
  • Bifidobacterium animalis, également utilisés pour favoriser les dysbioses intestinales.
  • Bifidobacterium longum, également utilisé pour améliorer le transit, le métabolisme des glucides, des lipides et des protéines et l’assimilation des vitamines et des minéraux

Le sulfate de glucosamine pourrait également avoir des effets prébiotiques en permettant d’augmenter le nombre de bactéries bénéfiques pour les personnes souffrant d’arthrose(12). L’action du sulfate de chondroïtine qui agit sur l’inflammation et l’arthrose dépend de la présence ou non dans l’intestin de certaines bactéries comme l’Akkermansia muciniphila(13).

Preuve supplémentaire en plus des 13 études citées ? Ainsi, existe la micro-immunothérapie peut agir sur « les causes de la dégénérescence (mort des chondrocytes et destruction de la structure cartilagineuse) et sur ses conséquences (inflammation et douleur) », tout en envoyant le message approprié au système immunitaire sans provoquer d’effets secondaires.

Pour aller plus loin :Système immunitaire et médecine ayurveda

(1 à 5)
Berenbaum F. Osteoarthritis as an inflammatory disease (osteoarthritis is not osteoarthrosis!). Osteoarthritis and cartilage. 2013;21(1):16-21.
Scanzello CR, Goldring SR. The role of synovitis in osteoarthritis pathogenesis. Bone. 2012;51(2):249-57.
Sokolove J, Lepus CM. Role of inflammation in the pathogenesis of osteoarthritis: Latest findings and interpretations. Therapeutic Advances in Musculoskeletal Disease. 2013;5(2):77-94.
Robinson WH, Lepus CM, Wang Q, Raghu H, Mao R, Lindstrom TM, et al. Low-grade inflammation as a key mediator of the pathogenesis of osteoarthritis. Nature reviews Rheumatology. 2016;12(10):580-92.
Scanzello CR. Role of low-grade inflammation in osteoarthritis. Current Opinion in Rheumatology. 2017;29(1):79-85.
(6)Sarnáglia GD, Covre LP, Pereira FEL, De Matos Guedes HL, Faria AMC, Dietze R, et al. Diet-induced obesity promotes systemic inflammation and increased susceptibility to murine visceral leishmaniasis. Parasitology. 2016;143(12):1647- 55.
(7)Binvignat M, Sokol H, Mariotti-Ferrandiz E et al. Osteoarthritis and gut microbiota Department of rheumatology, Assistance publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP), hôpital Saint-Antoine, Sorbonne Université, Inserm UMRS_938, FHU PaCeMM, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France Doi : 10.1016/j.monrhu.2021.02.001
(8)Monda, V., Villano, I., Messina, A., Valenzano, A., Esposito, T., Moscatelli, F., Viggiano, A., Cibelli, G., Chieffi, S., Monda, M., Messina, G., 2017. Exercise Modifies the Gut Microbiota with Positive Health Effects. Oxid Med Cell Longev 2017, 3831972.
(9)Veronese, N., Koyanagi, A., Stubbs, B., Cooper, C., Guglielmi, G., Rizzoli, R., Punzi, L., Rogoli, D., Caruso, M.G., Rotolo, O., Notarnicola, M., Al-Daghri, N., Smith, L., Reginster, J.Y., Maggi, S., 2018. Mediterranean diet and knee osteoarthritis outcomes:A longitudinal cohort study. Clin Nutr. 2018 Dec 4. pii: S0261-5614(18)32565-2. doi:10.1016/j.clnu.2018.11.032.
(10)Dai, Z., Lu, N., Niu, J., Felson, D.T., Zhang, Y., 2017. Dietary Fiber Intake in Relation to Knee Pain Trajectory. Arthritis Care Res (Hoboken) 69, 1331-1339.
(11)Lei M et al. Benef Microbes, 2017 Jul 20; 1-8
(12)Rani, A., Baruah, R., Goyal, A., 2019. Prebiotic Chondroitin Sulfate Disaccharide Isolated from Chicken Keel Bone Exhibiting Anticancer Potential Against Human Colon Cancer Cells. Nutr Cancer 71, 825-839.
(13)Wang, Q., Huang, S.Q., Li, C.Q., Xu, Q., Zeng, Q.P., 2017. Akkermansia muciniphila May Determine Chondroitin Sulfate Ameliorating or Aggravating Osteoarthritis. Front Microbiol 8, 1955.

Partager sur Facebook Publié le 28 décembre 2023 par Laura Azenard.

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